Un soir de doute, un jour de pluie, une page blanche ? Lancez « Nine Million Bicycles » ou « Love & Money ». Laissez Katie Melua vous rappeler que la beauté existe, même quand elle se murmure. Surtout si elle se murmure…

Katie Melua est d’abord une voix, claire, posée, presque cinématographique, lorsqu’elle débute, en 2003. Au fil des années, elle s’est imposée comme une signature qui traverse les modes, les années, mais également les silences. À 40 ans, la chanteuse britanno-géorgienne n’a plus rien à prouver ; c’est sûrement ce qui la rend si inspirante. Elle a appris à dire non, à lever le pied, à se réinventer sans bruit aussi. Une force tranquille qui redéfinit les atours de la réussite, quand on est une femme, une artiste, une mère. Sans compromis. ELLE Luxembourg a eu l’immense chance d’interviewer Katie Melua, un mois avant son concert à la Rockhal, le 15 juillet 2025. Rencontre avec celle qui, désormais, sait s’écouter.

Vous avez un lien discret mais constant avec le Luxembourg. Que représente ce pays pour vous ?

Le Luxembourg a une place à part. J’ai eu la chance d’y jouer plusieurs fois, et à chaque fois, je ressens une attention rare. Ce mélange de cultures – française, allemande, luxembourgeoise – crée une ambiance très particulière. Ici, il n’est pas question d’exubérance, mais d’écoute. C’est précieux pour une artiste comme moi, qui travaille beaucoup dans la nuance.

Votre carrière a démarré très jeune. Est-ce que vous avez le sentiment de l’avoir parfois subie ?

C’est arrivé vite, c’est vrai : quand on a 19 ans, on ne maîtrise pas grand-chose. J’ai connu le succès, les tournées, les plateaux télé… tout s’enchaînait. Sans jamais faire de pause. Tant et si bien qu’à 26 ans, j’ai craqué ; un burn-out sévère. Je n’avais plus de repères ; plus de plaisir non plus. Ce moment a été très difficile, il a aussi été très fondateur.

Qu’avez changé depuis ?

Presque tout ! Ma façon de travailler, mon rapport au temps, à la performance. J’ai compris que ralentir, ce n’est pas échouer : c’est d’abord un acte de puissance. À présent, je choisis. Je ne cours plus après les attentes. Je suis plus alignée, plus sereine.

La maternité a-t-elle également joué un rôle dans cette transformation ?

Oui, bien sûr. Devenir mère m’a recentrée. Ça m’a obligée à réorganiser mes journées, à penser à l’essentiel. Et, d’une certaine manière, à me reconnecter à ce qui me touche vraiment. Je ne veux pas transmettre à mon fils une image de femme qui s’épuise pour tout réussir. Je veux lui montrer qu’on peut être ambitieuse, créative, présente, sans se perdre en chemin.

Votre dernier album, Love & Money, est justement très introspectif…

Il est très personnel. Je parle de l’équilibre entre ambition et intimité, de la valeur qu’on donne à notre temps, à nos relations. À travers mes chansons, j’essaie de créer un espace où l’on peut respirer. Le monde peut être très dur ; mais il est aussi traversé par des éclats de beauté. Je veux capter les deux.

Est-ce que cette lucidité vient aussi de vos passages à vide ?

Sans doute. Quand on perd la voix, littéralement ou symboliquement, et que l’on vit dans une forme de peur permanente, on change. Quand ma voix est revenue, j’ai eu l’impression qu’on m’offrait une seconde chance. Depuis, je prends tout beaucoup moins pour acquis. Même chanter. Même respirer.

Quel conseil donneriez-vous à la Katie de 20 ans ?

Je lui dirais : « tu n’as pas à tout prouver tout de suite. Tu peux respirer. Tu peux faire des erreurs. Ne t’inquiète pas de ce que tu ne peux pas changer. Et surtout : ris plus. Ne prends pas tout aussi au sérieux. »J’aurais aimé qu’on me dise ça à l’époque.

Vous êtes une artiste de l’émotion retenue. Est-ce volontaire ?

Je vais vers la musique pour retrouver une forme d’équilibre intérieur. Quand je suis submergée, je compose, j’écris, je chante. La musique ne sert pas à extérioriser pour moi, mais à canaliser. Elle me tient debout. Elle me calme.

Si vous deviez recommander une chanson à une jeune fille de 16 ans…

Je lui ferais écouter « Plane Song », qui évoque le pouvoir de l’imagination, inspirée d’un souvenir d’enfance en Géorgie, où je jouais dans des hélicoptères abandonnés en rêvant d’évasion. Dans les moments de doute, l’esprit peut rester libre : c’est vraiment ce que j’aimerais transmettre. Même quand tout semble figé autour de soi, l’imagination peut ouvrir des portes.

Quelle est aujourd’hui votre définition du succès ?

Rester fidèle à moi-même, tout en continuant à avancer. Avoir un impact, oui. Mais ne plus jamais m’oublier en chemin. Travailler dur, proposer quelque chose de véritablement singulier. Avoir un peu de chance aussi ; il faut savoir le reconnaître.

Et votre source d’énergie ?

Mon fils, Sandro. Mes proches. La nature. La musique, toujours. Et cette conviction qu’on peut faire les choses autrement, avec plus de lenteur, en étant plus en conscience, lentement. C’est là que je me sens puissante aujourd’hui, dans cette capacité à choisir.

Katie Melua, le 15 juillet 2025 à la Rockhal : attention, dernières places disponibles !

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